mardi 2 mars 2010

Shutter island - critique -

En 1954, Teddy Daniels et son coéquipier Chuck Aule, deux marshals, sont envoyés en mission sur Shutter island, une île où sont détenus les plus grands malades mentaux du pays, pour résoudre une enquête des plus mystérieuses. Rachel Solando, une patiente de l'hôpital, s'est mystérieusement évaporée de sa cellule sans que personne ne s'en aperçoive. Teddy pose des questions, trop gênantes, amenant à la surface les possibles failles du système psychiatrique de l'hôpital... La course à la vérité est alors enclenchée. Ce qui est formidable avec un type comme Martin Scorsese, c'est qu'on ne sait jamais trop à quoi s'attendre de ses films. Et ce qui est encore plus formidable avec un type comme Martin Scorsese, c'est sa capacité déconcertante à créer une atmosphère immédiate dés le début de ses films (Les nerfs à vifs, Les infiltrés). Ici, un grondement se fait entendre, puis un air musical angoissant (provenant du film Shinning), et les lettres en grosses capitales qui prennent tout l'écran sur fond de sirène de bâteau à la rescousse des éventuels survivants d'un naufrage. Le climat anxyogène est d'ores et déjà palpable et les vingt premières minutes, fiévreuses, rendent compte de l'intensité avec laquelle le réalisateur prend la main du spectateur pour le conduire dans un lieu inquiétant et pollué d'étrangetés en tout genre. Le film est presque à voir comme un huis-clos, qui pourtant est loin d'en être un : l'immensité de la mer, l'étendue du ciel, la végétation foisonnante, les fleurs joliment ensemencées dans la terre... Ainsi Shutter island joue avec nos nerfs avec un simple décor, un simple détail. Scorsese n'a rien laissé au hasard. Chaque plan conserve son capital d'informations pour déchiffrer les énigmes, chaque visage est savamment étudié pour interpréter les révélations de cette enquête. Il s'y dégage alors comme une ambiance de paranoïa, doucement folle, où chaque regard de revolver tire ses balles au moindre faux pas, et où chaque comportement est contrôlé à la moindre incartade.
La progression de l'histoire est hallucinante de maîtrise. Le spectateur ne se laisse à aucun moment happer par la fatigue de la narration. Dicaprio, qui monte à chaque fois en grade à chacune de ses prestations à l'écran, interprète avec brio son personnage, parfait à tous les niveaux, nous communiquant son stress et sa volonté de dévoiler le sordide secret qui semble peser sur l'île. Les seconds rôles, tous plus névrosés les uns que les autres, ne sont pas sans réserve. Aucun n'est anecdotique, et transfigurent leurs personnages dans une interprétation sans faille. Là où Scorsese mérite les éloges, c'est qu'il se n'est pas contenté d'amener de l'action pour le simple divertissement mais davantage par nécessité. Il a ainsi préféré travaillé sur l'esthétisme de son long-métrage, d'une si grande froideur qu'il rendrait compte dans la salle d'un courant d'air qui vous glacerait le dos. Shutter island respire donc le thriller sous toutes ses coutures, respectant tous les codes conventionnels du genre. Cadrages renversants, contre-plongées d'une grande audace, dialogues intelligents, acteurs impeccables, le film est un petit bijou noir comme on les aime et qui respire l'intelligence. En somme, un genre cinématographique en voie de perdition...

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