mardi 4 août 2009

La Vierge en bleu de Tracy Chevalier - critique -

Récemment arrivée des Etats-Unis avec son mari, Ella Turner a du mal à trouver sa place dans cette bourgade de province du sud-ouest de la France. S'y sentant seule et indésirable, elle entreprend des recherches sur ses ancêtres protestants qui eurent à fuir les persécutions pendant les guerres de religion au XVIe siècle. Elle est alors loin d'imaginer que cette quête va bouleverser sa vie.
La Vierge en bleu est le premier roman de Tracy Chevalier. Et cela se ressent car son style, qui s'est amélioré de roman en roman, alourdit ici ses phrases si bien qu'on a du mal à se mettre dans le bain. Pour commencer, le fait d'avoir choisi les guerres de religion comme arrière-plan à l'intrigue est un exercice assez périlleux (surtout du point de vue d'une étrangère). Cette période de l'Histoire de France, qui donne bien assez de fil à retordre aux historiens même, oppose ici les calvinistes avec les catholiques. Cela se révèle au final inutile car trop superficiel sur son fond, et surtout bien trop manichéen : le protestantisme apparaît comme une secte (le mari violent et la belle-mère enfermée dans son silence) et le catholicisme comme une religion victimisée (Isabelle qui se fait battre presque comme une martyr, qui est montrée du doigt comme une sorcière et qui est indésirée en raison de ses convictions).
Ce qui pose également problème, c'est le choix involontaire de Chevalier d'avoir voulu tromper son monde en présentant à ses lecteurs la France du XXIe siècle comme chauviniste à mort. Nous, français, ne sommes pas dupes, et voyons dans cette image qu'elle propose une caricature épouvantable qui s'infiltre dans chaque chapitre mettant en scène Ella. Sa difficulté à s'intégrer dans ce village du sud-ouest, à se faire bien voir par les autres, redoublant d'effort pour parler la langue... Bref, le village repousse forcément les étrangers, les regarde forcément du coin de l'oeil, parle forcément dans leur dos : la lecture devient vite agaçante et indigeste (surtout à côté d'une Suisse lumineuse avec des habitants accueillants). Ce qui est fort dommage car on sent nettement l'évolution psychologique et intérieur d'Ella dans sa quête de découvrir son arbre généalogique et la raison de ses inquiétants cauchemars. Chevalier a d'ailleurs davantage concentré son attention sur Ella au détriment d'Isabelle, dite La Rousse, provoquant un déséquilibre entre les chapitres alternant les deux époques. Le parcours d'Ella s'inscrit dans la longueur faisant succéder les jours et les semaines tandis que celui d'Isabelle représente plus un moment-clé de sa vie.
La Vierge en bleu n'est pas un mauvais roman, loin de là. Mais il n'est certainement pas non plus le meilleur de Tracy Chevalier. On sent le brouillon pour ses prochaines péripéties, ses appuis, ses marques. L'histoire est attachante avec une fin spectaculaire et parfaitement écrite et retranscrite ; mais qui ne rattrape malheureusement pas les quelques 300 autres pages. L'accumulation de clichés et ce manque de peps aux aventures de l'héroïne alourdissent considérablement les pages, sans pour autant ôter aux lecteurs son envie de découvrir les intrigues et le fin mot de l'histoire. Ce qui en soit n'est déjà pas si mal !

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